Les fichiers de l’Education nationale (Xavier Darcos, Luc Chatel)

Jamais une administration n’avait accumulé en si peu de temps de nouveaux fichiers nominatifs, de Base élèves (dès 3 ans) au "livret de compétences", en passant par ceux qui "décrochent" du système éducatif...

JPEGCette année l’EN a une nouvelle fois montré sa capacité à renforcer le contrôle social sur les familles en multipliant les outils de gestion informatique de la scolarité.

1er degré : Le fichier Base élèves (BE) et la BNIE. BE est obligatoire dès l’inscription en maternelle. Il déclenche la création d’un INE (identifiant élèves), lui-même géré dans une base nationale (la BNIE) qui conserve ses infos pendant 35 ans [1]. La BNIE n’a fait l’objet d’aucun décret ni arrêté. Témoignage d’un « statisticien formé à l’école de l’Insee » : « j’ai appris durant toute ma scolarité qu’il ne fallait JAMAIS réaliser une base comme la BNIE et qu’il y avait bien d’autres chemins pour obtenir les mêmes résultats statistiques. (...) Vous avez peut-être entendu parler du recensement de la population, des bases de la sécurité sociale, du fichier de recensement de la police... Tous ces fichiers sont soit anonymes (population), soit ne recensent pas toutes les personnes et sûrement pas pendant 35 ans » [2].

En juin 2009, le Comité des droits de l’enfant de l’ONU a, entre-autres remarques, souligné ses inquiétudes à propos de ce fichage précoce et les incertitudes qui pèsent sur ses interconnexions possibles et futures [3]. Réponse du ministère ? Rien à craindre, car "les données sont réparties dans trente bases de données académiques qui ne communiquent pas entre elles" (réponse à un député). Les opposants demandent justement à ce qu’aucune donnée nominative de sorte des écoles, car les services départementaux y ont accès (les inspections académiques), alors qu’ils n’ont « aucun besoin du nom des élèves pour gérer des effectifs ». Et les IA peuvent être, comme les préfets, sous obédience politique. Le collectif de résistance CNRBE a montré comment, par une astuce mêlant BE et l’INE, identifier des familles d’origines étrangères. Récemment, près de Rennes, l’arrestation d’un père sans papier l’a illustré [4]

2nd degré.
L’application "Sconet" (collèges et lycées) vient d’être officiellement raccordée au fichier des "décrocheurs" (SDO : suivi de l’orientation). Au moment même où le gouvernement veut réprimer l’absentéisme en coupant les allocations familiales aux parents !
 Trois autres fichiers ont fait parler d’eux : Affelnet (affections par le net), Postbac (inscriptions études universitaires), et AppliEO (opération "école ouverte" touchant de enfants en difficulté)...
 Le plus sensible l’a été en catimini : un "livret de compétences", qui sera géré en ligne comme BE, a été lancé en "expérimentation". Ficher les compétences est pourtant ultrasensible. Il n’a fait l’objet d’aucune publicité... [5]
 Pour finir cette symphonie : "MOSART", qui fiche les profs sanctionnés pour retraits de salaire pour "service non fait" (désobéisseurs, grévistes, et même directeurs n’ayant pas rempli Base élèves !).