Wanadoo Data / groupe groupe France Télécom

Profitant de son monopole dans le téléphone fixe et les annuaires, FT a confié à sa filiale Wanadoo le soin de commercialiser le plus vaste fichier nominatif créé sans accord préalable de l’abonné

Wanadoo Data est la base de données privées la plus vaste du pays et profite des fichiers de sa maison mère (notamment celui des abonnés au téléphone enrichi grâce au monopole). Cette filiale de France Télécom peut effectuer des croisements sur des fichiers de toute nature. Si Wanadoo Data se targue d’obtenir l’accord express de la personne (opt-in) pour ses activités internet, en revanche d’autres données qu’il récupère n’y sont pas soumis (lorsque l’on ouvre une ligne France Télécom les données personnelles sont conservées par défaut exploitation commerciale).

A CHARGE

Dossier du mensuel Newbiz ("COMMENT VOUS ÊTES SURVEILLÉ", novembre 2001)

En France, il faut payer pour ne pas figurer dans l’annuaire. Une inscription sur la liste rouge coûte 15 francs par mois et rapporte 800 millions de francs par an à France Télécom. Payer pour ne pas être fiché, un comble ? Personne aujourd’hui ne semble remettre ce système en cause. Il risque de se généraliser si les internautes et les citoyens n’y prennent garde : aujourd’hui, les entreprises cherchent par tous les moyens à collecter un maximum d’informations sur leurs clients (...), des fiches d’informations détaillées qui viendront garnir aussitôt les bases de données clients de ces entreprises, championnes de la relation client ou du « customer relationship management » (CRM), comme disent les consultants. Un danger pour la vie privée ? Certes, le CRM n’en est qu’à ses balbutiements, mais les derniers obstacles techniques à sa mise en place sont en train d’être levés. La progression des capacités de stockage, d’abord. Elle permet d’enregistrer des fichiers toujours plus volumineux. Les logiciels d’analyse et d’extraction de données, ensuite : ils sont de plus en plus performants, permettant désormais de constituer des « populations d’individus » selon des dizaines de critères. Bref, la taille et la « pertinence » des fichiers s’accroissent. Par ailleurs, pour financer leur gestion et leurs mises à jour, les entreprises n’hésitent pas à revendre des paquets de données à d’autres sociétés.

Vous venez d’emménager dans votre nouveau logement ? Dans ce cas, vous avez certainement demandé à France Télécom de vous ouvrir une ligne... Donc, vous êtes aussitôt venu « garnir » le fichier de Wanadoo Data. Cette filiale de France Télécom est issue de la fusion, en mai dernier, de deux entités de l’opérateur : Mediatel, la société qui gérait jusqu’alors le fichier des abonnés de France Télécom, et Chronaxies, spécialisée dans le traitement et l’hébergement de bases marketing. Wanadoo Data se porte bien : 11 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2000 grâce à la revente de fichiers. Et sa base, qui contient quelque 19 millions d’adresses -celles des ménages qui possèdent un téléphone fixe- est en passe de s’enrichir. D’abord, grâce aux données fournies par les 3,5 millions abonnés à Wanadoo lors de leur inscription. Ensuite, grâce au programme de collecte de données, mis en place cet été. Ce programme aurait permis, indique Annie Madec, la responsable marketing et communication de Wanadoo Data, de recueillir 350000 adresses e-mail qualifiées. « Qualifiées », parce que bien entendu, ces adresses e-mail sont accompagnées d’informations personnelles (âge, état-civil, profession, centres d’intérêt, etc.) fournies sans retenue par les internautes alléchés par les perspectives de remporter un Camescope numérique, des séjours au soleil, ou des planches de surf.

Orange fait remplir un autre questionnaire à ses abonnés, qui sont amenés à préciser le nombre d’enfants et le type de logement habité. Mais ce n’est pas tout. Vous appelez un correspondant depuis votre mobile ? Orange (SFR et Bouygues le font aussi) enregistre le numéro de votre interlocuteur et le temps de communication. Ces informations, stockées, sont indispensables à la facturation. Le hic provient des logiciels qui permettent d’analyser l’appel téléphonique. Ainsi, ceux qui téléphonent beaucoup à l’étranger se voient proposer des options à l’international, par exemple. Mais, parfois, ce marketing bien huilé dérape. « Je connais un abonné de British Telecom, raconte un consultant, qui a reçu une proposition de forfait "adapté à ses communications". L’opérateur avait remarqué que l’abonné appelait souvent le même numéro, situé dans le voisinage. Problème, ce numéro était celui de sa maîtresse. Et la personne qui a ouvert le courrier était sa femme. » (....)

Votre opérateur de téléphonie mobile sait aussi où vous vous trouvez. Votre position géographique est enregistrée au moment de l’appel. Cette information n’est, a priori, pas destinée à vous fliquer systématiquement. Elle est toutefois stockée pendant un an et peut être consultée a posteriori , sur commission rogatoire, pour les besoins d’une enquête judiciaire. Ces données géographiques sont, par ailleurs, à la source d’un nouveau business : la géolocalisation. Des services plutôt inoffensifs (le magasin qui vous envoie une offre de réduction quand vous passez devant) mais qui peuvent aussi devenir intrusifs : les chefs d’entreprise pourront savoir si leurs commerciaux sont au bar ou en rendez-vous ...

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