Considérant que les candidats aux BBA doivent s’être distingués en menaçant la "sphère privée" mais aussi "par leur promotion de la surveillance et du contrôle de personnes", le groupe de restauration collective Sodexho Alliance a reconnu publiquement avoir investi contre sa propre éthique pendant plus de 6 ans dans le monde carcéral privé aux Etats-Unis ; il maintient ses actifs en Europe alors que la privatisation à outrance des prisons est dénoncée par un rapport du parlement européen, un marché entretenu par des groupes industriels dont Sodexho apparait en première ligne.
Sodexho s’est diversifié depuis 1987, via sa filiale SIGES, dans la prestation de services multi-cartes dans les prisons ou ’centres de détention’ profitant de la privatisation à outrance du monde carcéral. Selon ses propres chiffres datant de 2001, en Europe et en Australie Sodexho est prestataire pour 17 établissements au total. Elle a investi en France dans 8 établissements carcéraux, et intervient non seulement pour la restauration mais aussi dans la maintenance ou la sécurité en passant par le nettoyage, l’enseignement, le travail, la formation, le transport ou la santé.
A CHARGE
Rapport "Technologies dans les Prisons", rapport officiel du STOA (organe de recherche du Parlement européen), étude réalisée par le GRIP de Bruxelles (Groupe de recherche sur la paix et la sécurité), juillet 2001.
Ref : http://www.ib.be/grip/bdg/pdf/g1771.pdf
L’étude cite parmi les entreprises spécialisés dans les prisons privées le groupe britannique UKDS :
"UKDS (United Kingdom Detention Services), filiale du leader américain du marché de l’emprisonnement Corrections Corporation of America et de l’entreprise française de restauration rapide Sodexho, qui dessert déjà nombre de prisons françaises en gestion semi-privée, ouvertes dans le cadre du "Plan 13 000" lancé sous le gouvernement Chirac en 1986."
Aux Etats-Unis :
"CORRECTIONS CORPORATION OF AMERICA. Leader du marché privé aux Etats-Unis, elle totalise 72.000 lits et est implantée dans 26 Etats ainsi qu’au Royaume-Uni, en Australie et à Puerto Rico. Elle possède plusieurs filiales. http://www.correctionscorp.com."
Cette année des appels au boycott contre la marque ont été organisés sur des campus américains en raison de son investissement dans le groupe US Corrections Corporation of America (8% acquis en 1994).
Sodexho a revendu ces parts officiellement (en mai 2001), ce qui en soi ne retire pas la pertinence de la cendidature à la présente compétition, comme le fait que cette activité représente environ 1% du chiffre d’affaires total du Groupe (94 millions d’euros en 2001). Le groupe reconnait avoir investi contre ses propres principes :
"Notre participation dans CCA était en contradiction avec la politique officielle de Sodexho Alliance en matière de services aux prisons. (...) Sodexho ne propose ses services aux établissements pénitentiaires que dans les démocraties mettant en ouvre des politiques de réinsertion des détenus et ayant aboli la peine de mort, Sodexho se refuse à devenir propriétaire d’une prison ou de tout autre bâtiment de détention, Sodexho se refuse à assurer des services qui contraindraient ses collaborateurs à porter des armes à feu."
– Ref : Communiqué public du 30 mai 2001 :
http://www.sodexhousa.com/pr0530s.html
A CHARGE (2)
+ Conditions du détenu-travailleur
+ En juin 2001, un collectif d’associations (regroupant Act Up-Paris, Commission Prison de la Confederation Nationale du Travail, ODU, Ras les Murs et SCALP-Reflex) lance une campagne de sensibilisation.
– Ref : "Les prisonniers, c’est du fric pour SODEXHO", 20 juin 2001.
http://oduis.free.fr/sodex.html
Extraits :
"(...) La SIGES (Société d’investissement et de gestion des services), filiale de la Sodexho, a investi dans 8 prisons en France dont 5 centres de détention, Argentan, Châteauroux, Châteaudun, Neuvic et Uzerche, et 3 maisons d’arrêt, Bois d’Arçy, Chartres et Nanterre. Elle y intervient pour des contrats allant de la restauration (sa spécialité dont le marche est évalue a 5,5 milliards d’euros) a la maintenance ou la sécurité en passant par le nettoyage, l’enseignement, le travail, la formation, le transport ou la santé... Elle fournit, également les produits cantinables par le biais de sa "boutique interne", a des prix exorbitants.
"Elle propose aujourd’hui aux gouvernements des démocraties solvables des solutions globales ou la SIGES gère la construction, la sécurité et le financement de chaque établissement. C’est ainsi qu elle a developpe ses activités en Australie, en Grande Bretagne et aux Etats Unis ou la privatisation y est totale et le taux de sous traitance en augmentation (entre 10 a 18%). (...)
"Pour autant lorsqu’elle explique qu’elle forme et réinsère des détenus par le biais du travail, elle oublie juste de signaler que ces prisonniers ne signent aucun contrat de travail et sont rémunères a la pièce ou de toute façon sans rapport avec un quelconque salaire minimum. Ainsi le "salaire" moyen d un détenu en France oscille entre 800 et 1200 francs par mois. La SIGES réalise aujourd’hui 1% du chiffre d affaire du groupe Sodexho soit 49 millions d’euros mais elle estime le marche des 2.500.000 personnes incarceres en occident a 45,6 milliards d’euros. Elle est présente dans chacune des étapes de l incarcération d un détenu a partir de sa condamnation : elle l’emploie, le nourrit, lui fournit les produits cantinables, le "soigne", le blanchit, le forme, le réinsère, le surveille... (...)"
REPONSE de Pierre Bellon, Président de Sodexho Alliance
"Sur le plan de l’éthique de l’entreprise, Sodexho réaffirme que le Groupe n’exerce cette activité que dans les pays démocratiques, ne pratiquant pas la peine de mort et pour lesquels la finalité de l’incarcération est la réinsertion. De plus, Sodexho n’est propriétaire d’aucune prison.
Entreprise de restauration et de services, Sodexho apporte, dans le respect des réglementations nationales et des contrats passés avec les administrations pénitentiaires, des services tels que la formation professionnelle, la santé, le nettoyage, la maintenance, le courrier, la restauration, et dans certains pays, la surveillance des détenus.
Réduire l’activité de Sodexho à la seule sécurité dans les prisons estcaricatural et totalement faux.
(...) L’activité de Sodexho dans les prisons est non seulement légitime, mais elle répond aussi à un besoin relevant du service public."