Sénateur Robert Del Picchia (fichier Schengen)

Alors que la commission européenne entend mettre des garde-fous au fichage européen des sans-papiers, le sénateur Del Picchia en appelle à plus de fichage policier, et conteste le droit à la vie privée.

Le système d’information Schengen (le « SIS »), opérationnel depuis 1995, est une base de données informatique commune qui relie entre eux les États participants aux accords de Schengen et comportant près de quinze millions de données concernant pour 10% des individus (disparus ou recherchés, sans-papiers) et pour 90% des objets (véhicules volés, armes dérobées, faux billets, documents détournés ou égarés).

Près de 35 millions d’interrogations du SIS ont été faites en France en 2004. Mais, sous sa forme actuelle, le SIS ne dispose pas de capacités suffisantes pour assurer les services nécessaires à plus de dix-huit États membres. Il a donc été décidé de remplacer l’actuel système par un système de deuxième génération permettant de faire face à l’augmentation du nombre d’États résultant de l’élargissement. À terme, la Commission européenne envisage une interopérabilité entre le SIS II et les autres bases de données existantes au niveau européen, comme la base de données sur les empreintes digitales des demandeurs d’asile (EURODAC) ou encore le futur système d’information sur les visas (VIS).

Le sénateur Robert del Picchia n’y voit pas d’inconvénient, sinon que le texte proposé par la Commission irait trop loin dans le respect de la vie privée.

En effet, il "aboutirait à une baisse très significative du nombre de personnes signalées dans le SIS", parce que la Commission envisage de restreindre l’obligation de signalement des sans-papiers "aux seules personnes présentant une menace grave pour l’ordre ou la sécurité publics et ayant été effectivement condamnées à une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à un an et cela uniquement pour l’une des trente deux infractions visées par la décision-cadre relative au mandat d’arrêt européen".

"Ensuite, le nombre des autorités ayant accès aux signalements aux fins de non admission serait considérablement réduit. Actuellement, tout policier peut avoir accès à ces données sur n’importe quel point du territoire. Dans son projet, la Commission européenne envisage de réserver cet accès aux seules autorités chargées des contrôles aux frontières extérieures de l’Union et à celles chargées de la délivrance des visas et des titres de séjour.

Or, cette mesure aboutirait à limiter considérablement l’efficacité de la lutte contre l’immigration illégale. En effet, dès lors qu’un étranger sera entré illégalement sur le territoire d’un État membre, il ne sera plus possible pour les policiers de savoir si cette personne a fait l’objet d’un signalement. Actuellement, 80 % des interrogations du SIS sont réalisées à l’intérieur du territoire des États membres, et, pour la France, plus de 40 % des interpellations d’étrangers en situation irrégulière sont faites sur le territoire national.

Enfin, et c’est peut-être la disposition la plus saugrenue, la Commission européenne envisage de reconnaître à toute personne ayant fait l’objet d’un signalement dans le SIS le droit d’être informée de ce signalement.

Or, peut-on sérieusement envisager d’informer les personnes qui ont fait l’objet d’un signalement en raison de la menace qu’ils pourraient représenter pour l’ordre public ou la sûreté nationale ? Faudrait-il, par exemple, envoyer un courrier à toutes les personnes concernées pour les informer de leur signalement dans le SIS ? Tout cela ne me paraît pas très sérieux.

Bien que les propositions de la Commission marquent un net recul par
rapport à l’existant, peu d’États membres ont jusqu’à présent marqué leur opposition. En effet, seules la France, l’Espagne, la Grèce et le Portugal ont dénoncé ces reculs. Et la Commission est restée jusqu’à présent inflexible sur sa proposition.
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