Rachida Dati a mis le soin qu’on connait à faire enfermer les mineurs délinquants. Mais c’est également à elle qu’on doit une certaine note aux parquets qui vaut à Julien Coupat d’être toujours sous les verrous.
A sa demande (et probablement à celle de la ministre de l’intérieur) la Direction des affaires criminelles et des grâces du ministère de la Justice a publié en juin une note à destination des parquets. Se fondant sur la soi disant "multiplication d’actions violentes commises sur différents points du territoire national susceptibles d’être attribuées à la mouvance anarcho-autonome", cette note assimile la "mouvance" à des terroristes. Si ce n’est que les faits cités ensuite n’ont que peu à voir avec le terrorisme. Il est question "d’ inscriptions sur les bâtiments publics, d’actions violentes au préjudice de l’état et de ses institutions" - entre parenthèse préfecture, douane, administration pénitentiaire, de jets d’engins incendiaires contre des bâtiments publics", de "soutien à des prisonniers ou des étrangers en situation irrégulière" , ou d’ actions "visant des établissements pénitentiaires en construction". La note somme les parquets "de porter une attention particulière à tout fait similaire" et d’en informer la section anti-terroriste "pour un éventuel dessaisissement à son profit" .
"La Direction des Affaires Criminelles voit des terroristes partout" s’est inquiété le Syndicat de la Magistrature après la publication de cette scandaleuse dépèche. "Cette manière de procéder devrait ainsi permettre – au prétexte bien commode et très consensuel de lutte contre le terrorisme – de renforcer la répression à l’encontre des différents acteurs du mouvement social."
Quelques mois plus tard, suite aux enquêtes sur les "sabotages de la SNCF" , neuf jeunes gens vivant à Tarnac sont interpellés et déférés devant un juge de l’anti-terrorisme. L’un d’eux, Julien Coupat est détenu depuis 5 mois pour "direction d’association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste", sans qu’aucune preuve tangible ne vienne étayer cette accusation.
Au palmarès de Rachida également, son coup de gueule, après que "des hordes" - en réalité quelques dizaines de lascars de banlieue - aient osé perturber la fête des lycéens réunis sur les pelouses de "son" Champs de Mars. "Je ne faiblirai pas !", a-t-elle martelé, exigeant un fichage immédiat des bandes organisées et plus de caméras, et ordonnant au Maire et au préfet de Paris de s’exécuter. "Il y a des lois dans ce pays, avait alors rappelé un haut fonctionnaire de l’intérieur. On ne peut pas faire n’importe quoi !".
La Garde des sceaux s’est davantage souciée de réprimer que de garantir les droits des justiciables. Un rapport 2008 de la CNIL a mis une fois de plus en évidence la mauvaise tenue du fichier STIC et a désigné les parquets comme fautifs. Pour 68 % des fiches la qualification est celle de la police et non celle retenue par le juge ; 79 % des classements sans suite, 70 % des relaxes et 99,5 % des acquittements ne sont pas transmis au responsable du traitement pour modification. Il aura fallu la médiatisation de ce rapport pour que la Garde des sceaux se décide enfin à faire déclarer à la CNIL le traitement automatisé Cassiopée (qui doit depuis des années informatiser les parquets) et à envoyer une note aux parquets leur demandant " de redoubler de vigilance dans l’exercice de cette mission".