Le Getics, lobby des entreprises pro-DMP

Pour réclamer le droit de se substituer à l’Etat dans la mise en œuvre du dossier médical personnel (DMP), pierre angulaire de l’informatisation totale des données de santé, en affirmant défendre "l’intérêt collectif".

Le "Groupement des entreprises des technologies de l’information et de la communication de santé" (GETICS) a été créé en septembre 2007 « afin de peser davantage dans le débat sur le dossier patient ». Fondateurs :
 le Snitem, lancé en 1987, "Syndicat National de l’Industrie des Technologies Médicales" : première association patronale en France de l’industrie des technologies et dispositifs médicaux ;
 Le Lesiss, créé en 2004, représente "Les Entreprises des Systèmes d’Information Sanitaires et Sociaux" : fédération des principales entreprises dédiées aux systèmes d’information de santé.

Le Getics représente près de 300 entreprises spécialisées dans l’équipement médical ou les TIC de santé, soit 80% des acteurs. Pour ses dirigeants, « La santé ne constitue pas une charge, mais un moteur de croissance (...). Tout doit être fait pour assurer le développement de ce secteur. » [1]

Leur volonté d’influencer le gouvernement n’est pas neuve. Dans un dossier intitulé "Le DMP au point mort - Pour la relance d’un projet d’intérêt national" [2], les mêmes lobbies rappellent comment, en mai 2006, ils avaient rédigé "une note commune prédisant que le DMP dans son actuelle configuration allait inéluctablement conduire à une impasse".

Une seule référence à la vie privée dans leur pensum : "Dans un contexte de vive polémique liée à une insuffisance de concertation de la part de la maîtrise d’ouvrage, la CNIL s’est récemment prononcée contre l’utilisation du NIR en tant qu’identifiant du patient pour ses données de santé. (Mais ce) n’est pas un obstacle à la relance du DMP. La mise en œuvre d’un numéro de santé au plan national, désormais élevée au rang de nécessité, peut être réalisée en parallèle de la mise en œuvre du DMP, à charge pour les industriels de gérer temporairement leur propre numéro d’identification."

Leur approche purement économique de ce thème ultrasensible ne surprendra pas. Mais l’ardeur avec laquelle ils s’animent risque bien de faire passer les préoccupations éthiques et morales, une nouvelle fois, au second plan, loin des "carcans sécuritaires" (sic). Résumé de leurs belles paroles :


 "le Dossier Médical Personnel, prévu par la loi et plébiscité dans les sondages, constitue un projet dont la France ne peut faire l’économie".
 "en dépit des lourdes pertes occasionnées par une phase d’expérimentations délibérément malmenées" (il faut mettre en oeuvre) "un scénario de rupture positive (pour) se substituer à une approche étatico-centralisatrice rejetée sans ambiguïté et avec vigueur par les principaux acteurs".
 "la motivation des prestataires à faire adhérer les patients en nombre contribuera à « créer la demande du patient » (et) cette appropriation par le citoyen de son dossier de santé amorcera un cercle vertueux qui conduira à une adhésion des professionnels au projet".
 le DMP "peut encore aboutir à condition de redonner confiance aux acteurs et de ne pas se laisser enfermer dans un carcan juridique et sécuritaire".
 En conclusion, ils notent que "les industriels n’ont pas besoin de subventions publiques, mais de conditions favorables à la création d’un marché pérenne" de l’informatisation des données de santé des patients, "au bénéfice de l’intérêt collectif" (sic).

Quant à Yannick Motel, DG de Lessis, il ne veut pas se "focaliser sur ce seul dossier". "Tout ce qui concerne la télémédecine et la télésanté intéressera de plus de plus les assureurs. En France, des expériences de géolocalisation des patients, au moyen de bracelets, sont en cours. Aux États-Unis, il y a déjà des dispositifs implantables avec des puces RFID". [3]