Isabelle Falque-Pierrotin, présidente du Forum des droits sur l’internet

Pour sa collaboration déterminée à l’évitement de toute évaluation scientifique et contradictoire de l’utilisation du vote électronique en France, et notamment, courant 2007, des machines à voter

Début 2007, les citoyens, les médias et les partis politiques ont pris conscience des problèmes engendrés par les machines à voter. Les citoyens ont été près de 100 000 à signer la pétition d’Ordinateurs-de-Vote.org . Les médias ont pour la plupart évoqué le sujet (presse, radio et TV...). Les candidats à l’élection présidentielle se sont presque tous exprimés contre le vote électronique (à l’exception du candidat de l’UMP). Par la suite, le sénateur Dallier (UMP) a déposé une proposition de loi d’abolition des machines à voter, et l’ASTI, fédération de scientifiques, a appelé à "ne pas recourir au vote électronique anonyme au nom du principe de précaution".

En dépit de cette mobilisation, les pouvoirs publics se sont entêtés et ont maintenu en place les ordinateurs de vote lors des élections présidentielle et législatives. Une évaluation scientifique et contradictoire de leur mise en œuvre s’imposait donc, notamment avant leur réutilisation aux élections municipales : certains maires vont tenter de se faire réélire par des systèmes informatiques dont ils ont la maîtrise.

Isabelle Falque-Pierrotin, réélue récemment à la tête du Forum des Droits sur l’Internet (FDI), a demandé à cet organisme de s’emparer du sujet dès le mois de juin 2007, bien que les machines à voter - n’utilisant pas du tout Internet - échappent totalement à la mission du FDI comme le confirment ses statuts (article 3). Le rapport produit [1] ne pouvait être qu’inconsistant, faute de moyens et d’une méthodologie adéquate. [2]. Ce qui a conduit notamment l’April à se retirer du groupe de travail, car "le ministère de l’Intérieur ne semble pas vouloir travailler de manière constructive", "chacun ne semble s’intéresser qu’à sa problématique (...) plutôt qu’aux problèmes réels et fondamentaux de contrôle démocratique, de fiabilité, de transparence, etc."

Le rapport du FDI considère, malgré ce qui a été dit plus haut, que les ordinateurs de vote sont « un dispositif qui satisfait les municipalités mais qui doit être amélioré », et il cautionne la poursuite de leur déploiement.

Il a de plus permis à Isabelle Falque-Pierrotin, alors qu’elle est conseillère d’Etat et donc représentante de ce dernier, d’ensuite accaparer la place destinée à la société civile dans le groupe de travail qu’a formé le ministère de l’Intérieur à l’automne 2007. Ce groupe de travail confirme la poursuite du vote électronique, une fois effectué un nettoyage de la réglementation [3].

Déjà pourvue de multiples fromages (Conseillère d’Etat, CNIL, FDI - bien que son troisième mandat ait été contesté -, CSPLA, mission Olivennes...), elle n’en est pas moins déterminée à s’en créer de nouveaux, par exemple sous la forme d’un "observatoire du vote électronique". Enarque et haute fonctionnaire, elle semble considérer que c’est son rôle de peser sur les décisions, en se substituant aux citoyens et aux élus.

Antécédents.
Isabelle Falque-Pierrotin a derrière elle un lourd passé : elle a depuis des années favorisé le développement du vote électronique, par Internet comme par machines à voter (cf la recommandation du FDI du 26/09/2003). Elle a édulcoré l’action de la CNIL : depuis qu’elle en est membre en 2004 (secteur des Libertés publiques), c’est elle qui signe les rapports basant les délibérations de la CNIL concernant le vote électronique. Son (in)action la plus notable concerne l’élection de l’Assemblée des Français de l’Étranger (nominée Orwell Etat & Elus en 2006) : la CNIL s’est contentée d’exprimer des « regrets ». Cela en dépit d’une parole plus sincère de fonctionnaires de la CNIL. Enfin, elle n’hésite pas à étaler publiquement sa méconnaissance du sujet.

Notes

[2Ordinateurs-de-vote.org, 27/12/2007 :
Le FDI surpris en plein hors-piste.

[3Annonce de la formation de ce groupe de travail « regroupant des représentants de l’administration, des collectivités locales et de la société civile » afin de faire « toutes propositions utiles quant à une éventuelle refonte du règlement technique et quant à d’éventuelles modifications du code électoral » dans le but de « renforcer la confiance des citoyens dans le recours aux nouvelles technologies »
Résultat du travail, nulle remise en question de l’opportunité du vote électronique :
 dans l’immédiat : "permettre aux communes qui sont aujourd’hui équipées de machines à voter de continuer à les utiliser et de ne pas en interdire l’usage à l’occasion des élections municipales et cantonales de 2008. Diverses mesures organisationnelles propres à renforcer la confiance des électeurs seront mises en place immédiatement, conformément aux préconisations formulées par le groupe de travail."
 par la suite : "À l’issue des scrutins de mars 2008, une réévaluation globale du système sera mise en oeuvre, et ce, avant les élections européennes de 2009. Cette démarche portera sur l’ensemble des aspects liés à l’utilisation des machines à voter avec une révision exhaustive des dispositions du code électoral ainsi qu’une refonte complète du règlement technique."