Afin d’opérer un "meilleur suivi du demandeur d’emploi", l’Etat, l’ANPE et l’Unedic ont signé une convention, le 5 mai 2006, qui retient le principe de la mise en place d’un profilage statistique, appelé « calcul de risques statistiques », effectué par les Assedic, et couplé avec l’expertise des conseillers de l’ANPE lors d’un entretien complémentaire. Le profilage statistique permet le pré positionnement du chômeur sur un parcours en fonction de son risque de chômage de longue durée et de la « composante emploi » (si le chômeur vise ou non un métier en tension).
Le logiciel "diagnostic social" classe les chômeurs en 3 niveaux de "risque de chômage de longue durée" et détermine leur degré d’"employabilité". Il se base sur 19 critères : les métiers recherchés par le demandeur d’emploi, le salaire souhaité, le niveau de qualification mais aussi des données personnelles comme la situation matrimoniale, le sexe, l’âge ou la nationalité. En fonction des réponses à ces questions, les demandeurs d’emploi sont classés en trois catégories : risque faible, modéré ou fort. Les premières expérimentations ont révélé un risque d’erreur de 15%, le danger étant de classer le demandeur d’emploi dans un parcours qui ne lui correspond pas.
"C’est du simple profilage comme dans les boîtes privées", selon Jean-Pierre Guénanten, de l’association de chômeurs MNCP interrogé dans le Parisien. "C’est absolument scandaleux : on enfonce encore plus les plus précaires tout en donnant les meilleurs chances aux autres. Maintenant, il va y avoir un chômage à deux vitesses !" Auteure d’un voeu demandant au Conseil de Paris des précisions sur ce logiciel, Catherine Gégout note pour sa part qu’"alors que cette modélisation n’est fiable qu’à 60% selon l’UNEDIC, elle sera pourtant exportée dans chaque bassin d’emploi d’ici fin 2006" alors même que "ces classification, mal utilisées, pourraient avoir pour effet de rendre le demandeur d’emploi responsable de sa situation".
Dans son rapport de mars 2006 consacré à « L’évolution de l’assurance chômage : de l’indemnisation à l’aide au retour à l’emploi », la Cour des Comptes reconnaît elle-même que "l’outil de calcul statistique du risque de chômage de longue durée (« profilage »), actuellement en cours de développement ne saurait remplacer le diagnostic professionnel du demandeur d’emploi réalisé par le conseiller de l’ANPE lors du premier
entretien professionnel. Comme le rappelle d’ailleurs la Cour, « partout, sauf aux Etats-Unis, la méthode allie utilisation de modèles statistiques et jugement personnel des conseillers ». (...) Il serait illusoire et probablement dangereux de penser que l’outil de calcul de risque statistique pourrait suffire pour permettre une orientation directe vers un co-traitant, un sous-traitant ou la prescription d’actions de formation ou d’évaluation, sauf à doter l’ASSEDIC de professionnels du placement".
Pour mémoire, en 2005, le ministre de la justice d’un Land allemand avait quant à lui proposé de faire porter un bracelet électronique aux chômeurs longue durée : "Beaucoup d’entre eux ont perdu l’habitude de vivre à des heures normales et compromettent ainsi leurs chances de travailler ou de se former. Leur surveillance peut constituer pour eux une aide importante".