Michèle Alliot Marie veut "un grand ministère moderne de la sécurité intérieure", quitte à réduire toujours plus le droit à la vie privée et les libertés individuelles. Et elle n’hésite pas à mettre des caméras partout : en juillet 2007, surfant sur la médiatisation des attentats de Londres et Manchester, elle a annoncé sa décision de "tripler en deux ans le nombre de caméras sur la voie publique, afin de passer de 20 000 à 60 000" d’ici 2009. "L’efficacité de la vidéosurveillance pour améliorer de façon significative la sécurité quotidienne n’est plus à démontrer" a-t-elle affirmé. Pourtant les seules études sérieuses sur le sujet tendent à prouver le contraire. Elle prévoit également "la possibilité pour les policiers d’accéder aux images des municipalités et des grands gestionnaires d’espaces publics : transports, centres commerciaux, enceintes sportives", sans aucune précision sur le cadre réglementaire.
MAM souhaite également coupler lecture des plaques d’immatriculation, et prises de vues des occupants des véhicules, dans le cadre de l’automatisation des péages d’autoroutes (système de péage virtuel sans barrière) . Ces dispositifs prévus par la loi du 23 janvier 2006, avaient suscité de fortes réticences de la CNIL, qui émettait des réserves sur la "prise systématique de photographie des occupants des véhicules empruntant certains axes de circulation". Son avis n’avait alors pas été pris en compte.
MAM est également celle qui a décidé d’équiper les "commissariats du futur" de drônes de surveillance. De type militaire, télécommandables à distance, "silencieux et quasi indétectable", dotés de caméras infra-rouges ils sont censés déjouer les actes terroristes mais aussi et surtout surveiller les banlieues et les manifestations. Des expérimentations ont déjà eu lieu, "toutes dans le département de Seine-Saint-Denis" note le Monde à qui Daniel Goldberg, député socialiste de Seine-Saint-Denis confie son inquiétude : "Sans encadrement légal strict, l’utilisation de drônes risque de passer, tôt ou tard, d’un usage exceptionnel en cas de crise à un usage préventif permanent renforçant ainsi la stigmatisation que ressentent les habitants des banlieues."
Le "Plan Cybercriminalité", annoncé par MAM en février 2008, pose lui aussi de nombreux problèmes de respect des libertés. Là, pas de vidéosurveillance, mais la possibilité « de capter à distance des données numériques se trouvant dans un ordinateur ou transitant par lui ». Ces perquisitions électroniques ne concerneraient "que" les "affaires les plus graves (terrorisme, pédophilie, meurtre, torture, trafic d’armes et de stupéfiants, enlèvement, séquestration, proxénétisme, extorsion, fausse monnaie, blanchiment) dès lors que les faits sont commis en bande", mais aussi "l’aide à l’entrée et séjour d’un étranger".
La mesure qui devrait être inscrite dans la LOPSI 2 (Loi d’orientation pour la sécurité intérieure) inquiète les associations de défense des sans-papiers. Rue89 racontait début décembre que deux salariées de France terre d’asile avaient été placées sur écoute pendant plusieurs mois avant d’être carrément placées en garde à vue pour avoir eu des conversations téléphoniques avec de jeunes clandestins qu’elles suivaient. En Allemagne, la cour constitutionnelle de Karlsruhe vient de reconnaitre le "droit fondamental à la protection de la confidentialité et de l’intégrité des systèmes informatiques" et d’interdire ces perquisitions, sauf en cas de "menace concrète" contre des vies humaines ou contre l’Etat.
Le Plan Cybercriminalité reprend aussi deux propositions fortement contestées par les acteurs d’internet et les associations de défense des libertés : le filtrage de sites illicites par le FAI (techniquement inefficace) et la labélilsation des contenus par une "Commission déontologique des services de communication au public en ligne". En 1996 un « amendement Fillon » à la loi de réglementation des télécommunications avait cherché à introduire le principe d’une telle entité, dotée de pouvoirs d’appréciation et de censure des contenus non définis par la loi. Il avait été censuré par le Conseil Constitutionnel.