Les "gérontechnologies"

Une caméra derrière chaque aïeul.

Depuis 1994 il existe un "Institute for Gerontechnology" en Pologne [1], à l’initiative du Professeur Herman Bouma. Les Gérontechnologies ont leur société en France depuis 2007, la SFTAG [2], un forum annuel et un site professionnel [3] : Gerontechnologie.net. Le terme designe, comme le dit si bien le site, le "design for old", la technologie au service des personnes âgées, la fusion entre la gérontologie et la technologie.

Dans les gérontechnologies on trouve par exemple depuis 2009, EDAO [4], un système de "video-vigilance" développé par Link Care Services, une boîte d’abord spécialisée sur les pertes d’autonomie liées à la maladie d’Alzheimer puis à toutes les pertes de mobilités des vieilles personnes. Le concept ? Surveiller les personnes âgées à l’aide d’un dispositif vidéo doublé d’un dispositif d’analyse comportementale des images, qui signale à l’opérateur d’EDAO, situé à distance, une situation "anormale". Le même système en somme, que celui de vidéo dite "intelligente" qui équipe de plus en plus de systèmes de vidéosurveillance privés et publics, en vue de détecter des comportements "anormaux" [5]. L’idée est venue de chercheurs canadiens, du Canadian Institutes for Health Research, qui ont étudié entre 2007 et 2010, à l’aide de caméras vidéos installées dans toutes les parties communes d’hospices, les chutes de patients [6].

A défaut de répondre à la solitude des personnes âgées, on leur propose ainsi de débourser 150 euros par mois pour 60h de surveillance diurne d’une pièce de la maison (c’est 30 euros de plus par caméra supplémentaire) et 200 euros par mois pour le forfait nuit, soit donc 350 euros par mois pour être surveillé [7]. La vidéovigilance serait-elle de la vidéo-escroquerie ?

En tous cas la solution a fait des émules puisque l’année dernière, en 2012, Link Care Services a lancé eDom en partenariat avec AXA et ADHAP [8], et un service similaire avec AAAD-vigilance dans les Alpes Maritimes [9]. Quand Norbert s’endormira sur son canapé après un bon film, Link Care Services enverra-t-il une équipe pour vérifier qu’il est assoupi ? Norbert et ses enfants risquent d’avoir des surprises sur leur facture EDAO ...

Wellness International, le bracelet électronique au quotidien

L’entreprise, dans son document de communication présente le fameux bracelet comme un "Lien précieux avec toute personne sous surveillance" [10] voila qui place tout de suite dans le décor dans lequel ses concepteurs l’ont créé : non pas juste un outil d’aide ou de prise en charge d’une personne atteinte de problèmes de santé, mais comme un outil de surveillance, possiblement appelé par la suite, à être utilisé pour des personnes non atteintes d’Alzheimer.

Sus le doux nom de "Protect Angel", cet appareil détecte automatiquement chaque mouvement, chaque franchissement de limite d’une zone définie au sein d’un périmètre prédéfini, présenté ici comme le "lieu de vie habituel".

Il est inamovible, donc imposé, et émet un signal et envoie un SMS, dans le cas d’Alzheimer à la famille, si la personne s’approche de lieux qualifiés de dangereux, comme une autoroute ou un plan d’eau, mais il ne suffirait que de quelques réglages pour que ces "lieux dangereux" deviennent des bibliothèques, des lieux d’échange et de partage culturel ou des lieux de rassemblement en vue de manifestations, avec SMS aux parents ou au législateur puisque le document nous apprend aussi que "jusqu’à trois numéros sont paramétrables".

[1] Site Institute for Gerontechnology
[2] Site de la SFTAG
[3] Gerontechnologie.net
[4] EDAO, la vidéo-vigilance au service des personnes âgées et des soignants
[5] La vidéo "intelligente" is watching you
[6] Les chutes des personnes âgées mieux comprises
Video capture of the circumstances of falls in elderly people residing in long-term care: an observational study
[7] Site Edao offre & tarifs
[8] eDom : une offre de vidéo-vigilance d’Axa Assistance et d’ADHAP Services pour favoriser le maintien à domicile
[9] AAAD Vigilance: La vidéo-vigilance
[10] Bracelet Oxatis