Explications : Antonio Vitorino, l’ex-commissaire en charge du dossier Justice, Intérieur et Libertés, a tenu à propos des passeports biométriques des propos particulièrement cyniques et moralisateurs.
« La crainte de la "technophobie" ne devrait pas rebuter les citoyens européens face aux passeports biométriques. (...) La biométrie, comme toutes autres technologies, n’est pas dangereuse en elle-même. Le point fondamental consiste à dire que la technologie n’est pas le mal. Il est de notre responsabilité politique d’accepter l’évolution technologique et de réglementer cette évolution en en tirant pleinement profit au lieu de l’ignorer ou de l’éviter. »
Selon les propositions de la Commission, le projet de passeport à puces électroniques (avec la photo et les empreintes digitales numérisées du détenteur) -, aurait dû mener à la mise en place d’une base de données « biométriques » centralisée, qui concernera la quasi-totalité des habitants de l’Union européenne.
Une mesure finalement retirée au dernier moment. Mais Antonio Vitorino a toujours été pour : pour lui, la vraie question concernant cette base de données est de bien configurer son cadre juridique. « Bien entendu, je reconnais que c’est l’usage fait de la technologie qui risque de contrevenir aux droits fondamentaux. Nous, la Commission européenne, le Parlement et [les gouvernements des États membres], devons apporter un cadre juridique. Il est [par ailleurs] important de mobiliser la société civile par souci de vigilance. »
Antonio Vitorino estime que la législation communautaire sur la protection des données suffit à garantir les droits et souligne que l’usage de la nouvelle base d’identification informatisée garantira, et non restreindra, la liberté. Mais il ne rappelle pas que la loi sur la vie privée ne s’applique pas aux domaines dits du "troisième pilier", soit les affaires d’immigration, de sécurité et d’affaires intérieures.
« Nous jouissons tous de la libre circulation dans les démocraties. Je suis sûr que nous voulons la maintenir. »
Et de citer le travail accompli dans le cadre de la base d’empreintes digitales d’Eurodac, un système qui permet « de comparer les empreintes digitales des demandeurs d’asile et des immigrants clandestins ».
Sur les 250.000 identifications, il n’y a pas eu une seule "fausse" identification ; un constat qui, selon Antonio Vitorino, démontre les bienfaits d’une base de données biométriques.
(...) Le commissaire européen dément les affirmations selon lesquelles le caractère obligatoire de l’identification par empreintes digitales placerait les citoyens européens sur le même pied que les suspects. « En tant que citoyen portugais, j’avais 10 ans lorsqu’on a pris mes empreintes digitales pour ma carte d’identité. Je ne pense pas que j’étais considéré pour autant comme un criminel ». Antonio Vitorino souligne que la volonté de l’Europe d’adopter des documents de voyage biométriques fait suite à une requête de l’Organisation internationale de l’aviation civile, et non de Washington.